La reddition des comptes décrétée par le régime va faire très mal. Et ce ne sont pas les hommes politiques qui seront les seuls à payer le prix fort. Depuis quelques jours, des hommes d’affaires sont l’objet de nombreuses poursuites judiciaires. Un véritable chasse à l’homme qui commence à pousser certains sénégalais à se poser des questions sur les conséquences qu’elles pourraient avoir dans le long terme. D’où les nombreux appels lancés pour éviter que cette reddition des comptes ne soit une chasse aux allures purement politique.
Sale temps pour les hommes d’affaires sénégalais ! Bon nombre d’entre eux sont sous le viseur de la justice. Depuis que la reddition des comptes est lancée, on assiste à une véritable traque de présumés fauteurs de la République. Les personnes qui ont été entendues ou arrêtées ces derniers temps ont tous eu un lien avec le régime sortant. Si certains ont eu une amitié avec l’ancienne famille présidentielle, d’autres étaient des souteneurs de l’ancien président Macky Sall. Ce qui fait dire à beaucoup qu’ils sont inquiétés à cause des relations étroites qu’ils entretiennent avec «Macky».
Samuel Ameth Sarr est le dernier des anciens souteneurs de Macky à avoir des démélés avec la justice. Dans cette affaire, ce sont certains de ses alliés de West African Energy (WAE) qui ont porté plainte contre lui. Mais pour ses souteneurs, c’est le nouveau régime qui cherche à le neutraliser. Homme d’affaires et ancien ministre sous Abdoulaye Wade, il est à la tête du plus grand projet énergétique de l’Afrique. Un projet qui pourrait permettre à notre pays d’assurer sa souveraineté énergétique.
West African Energy est un consortium sénégalais et mis sur pied par des sénégalais comme Samuel Sarr, Moustapha Ndiaye, Khadim Ba (lui aussi arrêté), Abdoulaye Dia, Arouna Dia. Chacun dans son domaine est un champion national économique. « Samuel SARR avait déjà réalisé 95% de la centrale avec un test réussi. Il y a quelques mois, des tests ont été réalisés avec succès au niveau de la centrale. Ces tests ont donné satisfaction aux investisseurs, aux initiateurs dudit projet qui fait la fierté de l’expertise nationale », selon certaines publications. Alors, son arrestation pourrait directement impacter le projet. D’autant plus qu’il est l’homme de confiance des partenaires étrangers.
«Nous affirmons que notre client est envoyé en prison pour des raisons purement politiques qui se démarquent totalement de sa gestion de la société West African Enery (WAE). C’est une commande politique qui vient d’être exécutée contre Monsieur Samuel SARR. L’objectif visé, c’était de l’envoyer en prison pour l’écarter de la gestion de WAE dont il est à la fois Directeur général et actionnaire. D’ailleurs, nous avons appris qu’une nouvelle Direction générale sera mise en place la semaine prochaine au niveau de WAE», soutiennent ses avocats.
Actionnaires dans ce projet, l’homme d’affaires Khadim Ba est aussi au cœur d’une tempête judiciaire. Le patron de Locafrique est placé sous mandat de dépôt, depuis le 4 octobre. Il est poursuivi, dans le cadre de l’affaire Dermond Oil, pour faux et usage de faux dans un document administratif, importation sans déclaration de marchandises prohibées, violation de la réglementation de change, escroquerie portant sur les deniers publics. La Douane lui réclame au total 215 milliards de francs Cfa. Il a tenté de conclure un accord avec les soldats de l’économie, mais ses propositions ont été rejetées. Depuis lors, il croupit en prison.
Khadim Ba a aussi été entendu dans l’affaire PRODAC. Avant lui, c’était Doro Gaye qui faisait face à la justice. Connu sous le sobriquet de «PDG» (Pape Doro Gaye) a été arrêté pour une affaire d’escroquerie foncière, portant sur un préjudice financier évalué à 1 milliard 200 millions de francs Cfa. L’homme d’affaires proche de Macky Sall sera libéré après un accord avec la partie civile. Depuis lors, certains avancent même qu’il serait en fuite.
Doro Gaye, homme d’affaires autrefois influent, voit son univers s’effriter depuis l’arrivée du nouveau régime. C’est aussi sous ce même régime que l’homme d’affaires Abdoulaye Sylla a été entendu à deux reprises par les enquêteurs. Il était accusé d’avoir fait sortir du territoire national avec un jet privé, 2,7 tonnes d’or courant février 2021, muni d’un ordre de mission signé par le Président Macky Sall en plus d’un manifeste sur lequel son nom était imprimé.
Abdoulaye Sylla avait démenti les faits qui lui étaient reprochés. Avant d’annoncer une plainte contre « personnes non dénommées pour faux et usage de faux dans des documents administratifs ». Plainte qu’il avait déposée sur la table du Procureur de la République du Tribunal de Grande Instance de Dakar. Alors pourquoi cette soudaine traque des hommes d’affaires ? Sont-ils coupables ? Ou payent-ils leur proximité avec l’ancien régime ?
Autant de questions qui restent en suspens. Mais une chose est sûre, si le nouveau régime ne desserre pas l’étau, les investisseurs et hommes d’affaires pourraient déserter le pays. Ce qui ne serait pas sans danger pour l’économie sénégalaise qui se reconstruit depuis la Covid et la guerre en Ukraine !
Aliou Niakaar Ngom pour xibaaru.sn