Ne politisons par l’armée
Qui pour dire à Ousmane Sonko que n’est pas un hasard si l’armée est appelée « la grande muette ? » Qui pour lui dire que c’est le président de la république qui est le chef suprême des forces armées ? Que la politique ne doit jamais violer l’intimité et la discrétion salvatrices de l’armée ?
Faire une telle révélation dans une campagne électorale et menacer les civils qui auront l’outrecuidance d’en parler, c’est à la limite de la démence. Aucune loi ne permet à un premier ministre de faire ce que Sonko a fait à Ziguinchor. Que des citoyens fassent des inférences fausses n’autorise nullement une sortie pareille. C’est simplement scandaleux : un État et sa sécurité ne se gèrent pas sur la place publique.
Un Etat, c’est avant tout un mythe qui enveloppe les symboles sous sceau du sacré. La sécurité d’un État est vitale, il ne faut faire référence à l’armée qu’avec parcimonie et responsabilité. La responsabilité pour un gouvernant est à la fois un sacerdoce et une éthique sous la forme d’une ceinture de sécurité pour éviter la folklorisation des institutions. L’éthique de responsabilité c’est avant tout de la retenue, de la décence, de la disponibilité à souffrir pour sauver l’essentiel.
Faut-il rappeler que le Maréchal Pétain, héros de la première guerre mondiale et traître de la deuxième guerre mondiale a avoué qu’il avait signé l’armistice, la mort dans l’âme ? La responsabilité, c’est cette disposition, inculquée par la bonne éducation et la compréhension de la complexité de la vie, à préférer mettre en péril sa personne, ses convictions et les honneurs au profit de l’intérieur général.
Un gouvernant n’est pas fait pour polémiquer à la borne fontaine. Les mots des hommes d’État sont des actes, voire des armes. L’intelligence politique, la bonne gouvernance, c’est aussi comprendre que la communication est ambivalente, elle est pouvoir de bien autant que de mal faire. Et toutes les fois que la communication politique ne fait pas du bien, elle fait du mal, elle détruit la confiance, sème le grain de la discorde dans les cœurs et menace l’unité nationale ainsi que la force de l’État.