Entre le parti des Patriotes Africains du Sénégal pour le Travail, l’Ethique et la Fraternité (PASTEF) et certains marabouts, ce n’était pas le grand amour. Lorsqu’ils étaient dans l’opposition, les camarades de Ousmane Sonko s’en sont violemment pris à ces guides religieux. Ce qui n’a pas facilité l’accession du président Bassirou Diomaye Diakhar Faye au pouvoir. Maintenant que les patriotes sont au pouvoir, le premier ministre tente de recoller les morceaux avec les religieux. Une tâche loin d’être facile. Le fossé qui sépare les deux parties s’élargit de jour en jour.
S’il y’a des choses qui ne sont pas passées inaperçues ces dernières années, ce sont les insultes. Des membres de Pastef ou sympathisants de Ousmane Sonko tiraient sur tout ce qui bougeait. Lorsqu’ils étaient dans l’opposition, ils ont voulu développer une pensée unique. C’est ainsi que certains patriotes ont franchi la ligne rouge en attaquant directement les khalifes généraux. Les patriotes ont tellement insulté les religieux que certains sont déclarés persona non grata par les talibés (disciples).
Lors du lancement des Domous Daara (personnes ayant fait leur formation dans les écoles coraniques), Ousmane Sonko avait banni les insulteurs de Pastef. « Je l’avais dit il y a cinq ans à Touba, et je le répète ici : toute personne tenant des propos irrespectueux envers les guides religieux ne fait pas partie de nous », avait-il déclaré. Ce qui n’a pas suffi pour arrêter la vague d’insanités. Lors des dernières manifestations, des patriotes sont allés jusqu’à renier leur appartenance confrérique. On assistait à une bipolarisation des confréries. Les talibés conservateurs d’un et ceux qui ne suivent que les politiciens.
Mais les nouvelles autorités sont en train de tourner le dos aux patriotes blasphémateurs. Le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a réservé ses premières sorties aux khalifes généraux des deux principales confréries au Sénégal. A la tête d’une délégation restreinte, le chef de l’Etat s’est rendu d’abord à Darou Minane où il a été reçu par Serigne Mountakha Mbacké avant de faire cap vers Tivaouane où il s’est entretenu avec le khalife général, Serigne Babacar Sy Mansour. La dernière sortie religieuse du chef de l’Etat a eu lieu dans le Sud du pays. Diomaye a rendu visite au marabout El Hadj Fansou Bodian.
Le président, accusé de salafisme, s’est prosterné devant les khalifes généraux. Un signe de respect qui fait monter la popularité de l’actuel président. Mais il n’est pas le seul. Le patriote en chef veut retrouver les bonnes grâces des religieux. Il est en train de poser certains actes aux côtés des khalifes généraux. Serigne Mountakha Mbacké a reçu un bélier offert par le Premier ministre. L’ancien maire de Ziguinchor avait envoyé une forte délégation pour distribuer six moutons à des chefs religieux, dont le khalife général des mourides.
Après Touba, le Premier ministre Ousmane Sonko a dépêché une délégation à Tivaouane, dirigée par Maguèye Badiane, afin d’offrir un bélier pour la Tabaski au Khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour. La délégation a été reçue par Serigne Moustapha Sy, fils du leader spirituel de la cité religieuse de Maodo, au domicile de Serigne Babacar Sy Mansour. Serigne Moustapha Sy a exprimé sa reconnaissance pour ce geste symbolique de la part du chef du parti Pastef et a prié avec ferveur pour les envoyés du Premier ministre.
Ces actions de Ousmane Sonko tendent à raffermir ses relations hostiles avec les chefs religieux. Les nouvelles autorités ont besoin des chefs religieux pour matérialiser le projet. En dehors du volet sprituel, les khalifes peuvent contribuer à la souveraineté alimentaire prônée par le régime. Ces religieux possèdent d’immenses champs qui produisent beaucoup. Khelcom en est un bel exemple. Si le chef de l’Etat et son premier ministre arrivent à faire intégrer ces religieux et leurs disciples, ils peuvent être sûr d’atteindre les objectifs qu’ils se sont fixés en un temps record.
Reste à voir si Ousmane Sonko va réussir sa nouvelle mission. Il sera difficile d’effacer tout le tort que ses partisans ont causé aux chefs religieux. Mais ce n’est pas tâche impossible. Les khalifes généraux savent écouter et pardonner. Pour cela, il faudra que les patriotes sortent de leur petite bulle. Car personne n’est indispensable. Tout ce qui compte c’est le développement du Sénégal !
Aliou Niakaar Ngom pour Xibaaru