En quatre mois, trois patients sont morts aux urgences de Grenoble en raison d’un défaut de prise en charge, selon les syndicats. JEAN-PIERRE CLATOT
L’intersyndicale du centre hospitalier de Grenoble a émis un signalement pour «mise en danger de la vie d’autrui» après la mort d’un homme de 91 ans. Le personnel dénonce le manque de moyens pour prendre en charge les malades.
«Les patients sont en danger.» C’est un cri d’alarme que lance Sara Fernandez, secrétaire générale de la CGT au CHU de Grenoble, après la mort brutale d’un homme de 91 ans à l’hôpital Michallon, le 12 avril au matin. Admis aux urgences pour une «confusion liée à une possible infection», le nonagénaire a attendu désespérément pendant trois jours son hospitalisation en gériatrie, les délais de prise en charge des malades étant rallongés compte tenu de la fermeture de 200 lits au cours des trois dernières années, souligne Sara Fernandez au Figaro.
«Le fait d’être resté seul et allongé si longtemps a certainement détérioré son état de santé, jusqu’à sa mort», déplore Sara Fernandez qui met en cause des conditions de travail délétères dans un service surchargé. «Dans un tel contexte, les soins spécialisés ne peuvent pas être réalisés. Donc, effectivement, attendre plusieurs jours sur un brancard peut accélérer le processus», confirme au Figaro Cyrille Velet, médecin anesthésiste-réanimateur à Grenoble et secrétaire général du syndicat national des médecins hospitaliers.
Trois décès brutaux en quatre mois
«Nos urgences ont une capacité d’accueil maximale de 55 patients. Dans les faits, on a en moyenne 80 passages, avec des pics pouvant aller jusqu’à 110. C’est intenable. Résultat, les gens traînent aux urgences pendant plusieurs jours alors qu’ils ne devraient pas y rester plus de 12 heures», illustre la syndicaliste qui pointe du doigt d’autres décès soudains ces derniers mois.
En décembre, une femme admise aux urgences de Grenoble a attendu une place en psychiatrie pendant trois jours. Elle a été retrouvée morte dans les toilettes du CHU. Quelques semaines plus tard, un autre patient qui attendait son hospitalisation dans un service adéquat a perdu la vie aux urgences alors que son état de santé n’était, initialement, pas alarmant. Face à cette inquiétante récurrence, l’intersyndicale a transmis un signalement au parquet de Grenoble, le 5 avril, «pour mise en danger de la vie d’autrui» en raison, notamment, du manque de moyens mis à disposition des soignants pour accueillir les patients.
La direction reconnaît des «difficultés majeures»
Ce mercredi, Éric Vaillant, procureur de la République, confirme avoir été saisi de ce sujet mais explique l’avoir classé sans suite pour absence d’infraction pénale. «Le signalement reçu dénonce une inaction des pouvoirs publics qui ne justifie pas l’ouverture d’une enquête pénale.» De son côté, le centre hospitalier précise au Figaro que le récent décès du nonagénaire «fait l’objet d’une instruction détaillée et d’une analyse complète en cours (…) comme chaque évènement indésirable grave».